Je vivais à l'écart de la place publique
Serein, contemplatif, ténébreux, bucolique,
Refusant d’acquitter la rançon de la gloire,
Sur mon brin de laurier, je dormais comme un loir.
Des gens de bon conseil ont su me faire comprendre
Qu'à l'homme de la rue j'avais des comptes à rendre,
Et que sous peine de choir dans un oubli complet,
J'devais mettre au grand jour tous mes petits secrets.
Mais des gens d'mauvaise foi ont su me faire entendre
Que ne mes anecdotes ils n'avaient rien à pendre.
Et quelques malfaisants à la langue perfide
Ont soufflé à mon nez leur haleine fétide.
Comme mes vieux souvenirs n'ont pas eu l'heur d'avoir
Les faveurs du public, j'les remets dans ma mémoire,
J'aime mieux m'en tenir à ma première façon,
Et contempler les vagues qui fuient vers l'horizon.
Alors je vais reprendre ma course tranquille
Qui m'emportera loin vers de plus calmes îles
Refusant d'acquitter la rançon de la gloire,
Sur l'pont de mon voilier je m'endors comme un loir.
Librement adapté de Georges Brassens : Trompettes de la renommée.
Et « qui se sent morveux, qu'il se mouche « (Ca, c'est de Molière : L'Avare, acte I scène 3)
Quant aux critiques que pourraient me valoir les incertitudes dues au temps qui passe sur les
mémoires :
« Je me les sers moi-même avec assez de verve
Et ne souffrirais point qu'un autre me les serve »
(Edmond Rostand : Cyrano de Bergerac, Tirade des Nez)